Singulière expérience : Kamel Daoud (Zabor ou Les Psaumes, NB novembre 2017), inaugurant la collection « Une nuit au musée« , passe une nuit parmi les toiles du musée Picasso à regarder, s’interroger, réfléchir. Comment perçoit-il l’art et l’érotisme, en tant qu' »Arabe », certes, mais affranchi de la prude loi coranique qui voudrait voiler l’Occident comme on voile une femme. Alors qu’en son pays, la nudité n’existe pas, il décèle dans les nus de Marie-Thérèse le cannibalisme de Picasso qui séduit, encercle, caresse son modèle pour mieux le dévorer : « L’érotisme est un rite de chasseur »… Abdellah – qui incarne ici le musulman rigoriste – détruirait avec bonheur toutes ces œuvres où la femme et le sexe sont exposés, magnifiés, morcelés… Pour Abdellah, outre l’abomination de la nudité, l’altération, la représentation de l’œuvre de Dieu sont blasphèmes que doivent effacer la mort ou la destruction ; les musées arrêtent le temps qui appartient à Dieu en conservant le passé… Tous ces thèmes, approfondis avec subtilité, sensibilité, et clairvoyance font résonance à notre actualité. (M.W. et A.-M.D.)
Le peintre dévorant la femme
DAOUD Kamel