Kukolka

Aux beaux yeux bleu-vert de Samira, sept ans, les candidats à l’adoption préfèrent la blonde Marina. La Tzigane au teint mat fuit l’univers draconien de son orphelinat ukrainien pour l’emprise de Rocky, sauveur et bourreau d’une horde d’enfants des rues. Mais le bout du tunnel est encore loin…   Terrifiant, ce premier roman de Lana Lux, comédienne d’origine ukrainienne, dénonce un système de réseaux qu’elle semble bien connaître. Il raconte l’errance et le calvaire d’une fillette échappée de son orphelinat et dont l’innocence et la crédulité sont exploitées par des individus sans scrupules. Le récit, terriblement réaliste – à tel point qu’on croirait presque à un témoignage – est écrit à la première personne en phrases courtes, sobres, factuelles, et décrit la vie misérable de l’enfant, faite de mendicité, de vols, d’abus sexuels, de cruauté. Au fil des pages on voit son innocence salie, saccagée, ses illusions s’envoler. On assiste à la manipulation perverse d’un amant qui l’initie à la volupté, en fait une vraie poupée vivante (kukolka), pour mieux la lâcher dans l’arène de la prostitution. On est ému par le courage de cette enfant-femme dont la voix est attachante et qui ne se laisse jamais abattre. Une lecture instructive mais éprouvante.  (S.D. et M.-N.P.)