Venise à double tour

Sensible depuis l’enfance aux beautés des églises et à la liturgie catholique, amoureux de Venise, Jean – Paul Kauffmann (Outre-Terre : le voyage à Eylau, NB mai 2016) arpente La Sérénissime à la recherche des quelque quarante églises (répertoriées sur plan) aux portes scellées. Qui les ouvrira au flâneur obsessionnel dont la quête ardente, organisée, se heurte à de fuyantes autorités, mais compte des amis bien introduits et des hasards heureux ? Accompagné de Sartre et de Lacan, revenant sur ses souvenirs personnels, il découvre cours et ruelles, redessine avec sa fabuleuse érudition des monuments connus, retrouve la vie de Vénitiens accablés de touristes pressés. Certaines églises s’ouvriront, révélant parmi les oeuvres d’art abandonnées l’incomparable qualité de leur silence, et dévoilant à l’auteur la part secrète de son propre destin. D’autres renaîtront ! L’écriture élégante, savante et limpide de ce récit mené comme une enquête, ravit, enrichit, émerveille. Exigeant, cet insatiable curieux relativise ses échecs et préfère la joie de l’inachevé à la tristesse de l’accomplissement. (A.C. et B.T.)