Chez son coiffeur, un philosophe (comme lâauteur) raconte Ă ses amis quâil Ă©crit la biographie de Kierkegaard, un homme solitaire qui a volontairement rompu avec son unique amour par crainte de lâengloutir dans sa mĂ©lancolie. Câest en fait de lui dont il parle dans une longue complainte Ă la femme qui lâa quittĂ©, espĂ©rant quâen le lisant elle le comprenne et revienne. La peine est la seule occupation de son existence. Au cours de ses pĂ©rĂ©grinations, il rencontre un vieux Danois qui revient chaque annĂ©e Ă Paris pour arpenter les lieux parcourus il y a quarante ans avec sa femme dĂ©cĂ©dĂ©e peu aprĂšs leur voyage de noces ; et aussi un vendeur de maĂŻs malien qui enduit de sel un Ă©pi sur dix, façon de pleurer son frĂšre venu le rejoindre au bout de dix ans. Chacun propose ainsi sa solution pour conjurer la perte et tenter de revivre.  Comme dans La preuve de lâexistence de Dieu (NB avril 2004), une Ă©criture belle jusquâĂ la sophistication, teintĂ©e dâhumour, rend comiques ces situations qui pourraient ĂȘtre tragiques.
Ce qui est perdu
DELECROIX Vincent