Dans sa cabine de péage, maître de l’autoroute, il se berce dans son ennui; les voitures se font rares. Leurs passagers paraissent affolés de douleur. La radio annonce qu’un bruit insoutenable pénètre les humains en un crescendo fatal… Lentement, la végétation gagne l’autoroute désertée, un gendarme crooner, un couple de surfeurs, une habituée du péage, curieusement indemnes, animent encore la solitude du péagiste qui poursuit la narration du désastre avec une objectivité tranquille. Est-ce lui qui le crée ou qui du moins l’orchestre, s’interroge le lecteur ? Ce phénomène serait-il lié au vol récent du Cri, célèbre tableau de Munch, suppose le narrateur ? Du reste, s’acheminant vers le dénouement, ce dernier trouve le tableau dans une voiture abandonnée… Les détails concrets valident l’invraisemblance de ce récit onirique ; et, comme dans un rêve, la personnalité enveloppante du héros irradie cette lumière particulière qui éclaire par faisceaux les voies obscures de l’inconscient. Le lecteur a reconnu dès les premières pages le style et le rythme uniques qui font un écrivain.
Le Cri.
GRAFF Laurent