Cette vaste fresque débute au XVIe siècle, moment où, déjà, la société chinoise reposait sur l’éthique confucéenne et l’indéfectible solidarité familiale alors que l’esprit d’entreprise suscitait un large réseau de commerce, légal ou frauduleux. De l’économie traditionnelle à l’insertion dans la mondialisation, l’histoire mouvementée de la Chine se poursuit à travers celle du capitalisme. Celui-ci, actuellement moteur de performances économiques surprenantes, est original, efficace, mais bâtard et brutal donc fragile. Les entrepreneurs privés sont noyautés et étroitement contrôlés par les élites bureaucratiques, détentrices du pouvoir politique. Et ce type de développement aux objectifs nationalistes, sans règles suffisantes, détériore l’environnement, aggrave toutes les formes d’inégalités, tandis que fraude et corruption le déconsidèrent dans l’opinion.
Marie-Claire Bergère, professeur et auteur spécialiste de la Chine, loin des clichés et explications monocausales, analyse ce capitalisme bureaucratique sans capitalistes, en reliant le présent au passé, à travers une société chinoise hétérogène, imprégnée des valeurs confucéennes traditionnelles et marquée par les soubresauts politiques. Cet ouvrage extrêmement documenté, passionnant, est accessible à tous malgré son austérité. Y contribue sa forme exemplaire : construction rigoureuse, chronologique et thématique, clarté, fluidité.