Il est assez constant, l’expérience venant, de regarder d’un oeil désabusé l’évolution de son métier, quel qu’il soit. Mais lorsque ce métier est considéré comme indispensable à la démocratie et influence à ce point l’opinion des citoyens, on comprend mieux la charge des auteurs contre le journalisme contemporain. Il n’est plus laissé de temps pour la réflexion, la compromission devient la règle, l’information s’efface devant le divertissement, l’animateur supplante le journaliste. Dans ce quatrième pouvoir, l’audiovisuel éclipse la presse écrite, l’entrée au capital des industriels génère conflits d’intérêts et autocensure, la toile est envahie par les amateurs. Tout contribue à un système irresponsable et étouffant, ce qui n’est pas médiatisé n’existe pas. Dans un style alerte et vivant, Elisabeth Lévy, avec sa causticité habituelle (Les maîtres censeurs, NB juin 2002), et Philippe Cohen épinglent avec férocité le journalisme moderne. L’amertume n’exclut pas l’humour et certains rappels sont jubilatoires : la saga de Libération passé de la révolution à la bourgeoisie, les avatars du Monde, les croisades moralisatrices, etc. La note finale se veut toutefois optimiste.
Notre métier a mal tourné : deux journalistes s’énervent
COHEN Philippe, LÉVY Elisabeth