L’imagier des gens

Un imagier de plus? Du style un bébé, un biberon, une chaise haute, un nounours? Et des images tendres et lisibles par les tout-petits?

Pas du tout ! Le titre l’annonce ; le graphisme, aux réminiscences très années trente, le confirme : cet ouvrage innove. Il met en regard, sur les doubles pages, des couples de personnages ; aux classiques et innocents un homme et une femme, une maman et un bébé, un papa et une famille, succèdent  brutalement un mort et une grand-mère. Le ton est donné, facétieux et irrévérencieux. Un aveugle et un distrait, un nudiste et l’homme invisible, un prisonnier et un fugitif, une couseuse et un fakir, un pompiste et un extraterrestre, Sisyphe et un docker, se font face avec malice et inventivité. Réalité, imaginaire et mythologie se côtoient avec humour et pertinence. Le lien entre les deux images qui se confrontent existe toujours, même s’il n’est pas forcément immédiat : l’image apporte son aide, comme dans le maître-nageur et le naufragé (le premier aperçoit le second dans ses jumelles), ou l’amoureuse et l’émir (reliés par un croissant de lune).

Au niveau graphique, le texte s’affiche en grandes lettres bleu pâle sur un beau papier mat de couleur crème, et les personnages sont des silhouettes de couleur rose soutenu pour les parties nues du corps, aux vêtements bleus, orange, marron, jaune ou vert olive. Facilement identifiables, leurs formes évoquent des pictogrammes et des publicités anciennes. L’impression, s’inspirant de la sérigraphie, est réalisée en trichromie : un bleu, un jaune et un rouge qui se superposent avec précision.

Cet imagier d’un genre particulier, d’un grand intérêt esthétique, allie plaisir de l’esprit et enrichissement du vocabulaire et de la culture des enfants par la mise en image et les jeux de relation entre les mots, amusant et subtil. À conseiller à partir de 6 ans, mais séduira aussi les adultes.