Le narrateur raconte, trente ans après, ses souvenirs de la guerre du Liban aux cotés des chrétiens en 1975/1976. Après une enfance rude dans la montagne limousine, le héros qui ne connaît pas son père, part vivre avec sa mère et une « soeur ». La tête pleine de Malraux, d’Hemingway…, il débarque à Beyrouth : il veut être un guerrier et un écrivain. Il entre dans la lutte comme on « prend la bure » faisant l’expérience de cette « poussée vitale » de la mort, dans l’ivresse du sang et de la poudre. Malgré la fraternité des combats et l’amour, réel ou fantasmé, de quelques jeunes femmes, il repart : seule l’écriture le délivrera de ce qui le hante.
Après la Corrèze (Dévorations, N.B. oct. 2006), le Liban sert de cadre à ce récit. Au-delà du portrait très fouillé d’un jeune homme complexe, l’auteur décline des positions radicales, provocatrices sans-doute : il dénonce la perte des valeurs de l’Occident chrétien, la trahison des élites… et la fin de la littérature et de la langue. Richard Millet invente une écriture dense, belle, crue parfois, des phrases longues, des digressions, à la limite de la saturation. Et surtout cet art de sonder les corps et les âmes qui suscite malaise et fascination. Un écrivain !
M.Bo. et E.B.