Les hommes sont-ils tous menteurs ? Menteurs, peut-ĂȘtre, mais ce roman illustre surtout le fameux « Chacun sa vĂ©ritĂ© ». Cinq voix diffĂ©rentes, cinq tĂ©moignages qui se complĂštent veulent Ă©clairer la personnalitĂ© et lâhistoire dâun poĂšte argentin. ArrĂȘtĂ© au temps de la dictature militaire, torturĂ©, relĂąchĂ© sans raisons apparentes, il sâest rĂ©fugiĂ© Ă Madrid, oĂč il retrouve un groupe de compatriotes, Ă©crivains et Ă©crivaillons, espions peut-ĂȘtre. Il meurt (se suicide ?) au moment oĂč un manuscrit qui lui appartient est publiĂ© et que chacun crie au chef-dâoeuvre. Celui-ci est intitulĂ© « Eloge du mensonge »⊠ Dâexplicitations en rĂ©vĂ©lations, dâhypothĂšses en faits avĂ©rĂ©s, on peine un peu Ă mettre en parallĂšle ces cinq rĂ©cits disparates, jusquâĂ la derniĂšre partie qui donne Ă lâensemble sa cohĂ©rence ; de plus, les rĂ©fĂ©rences littĂ©raires ne sont pas toujours familiĂšres. Mais Alberto Manguel, un temps le secrĂ©taire de Borges, tient de son maĂźtre la subtilitĂ© ironique du style et lâambiguĂŻtĂ© de la pensĂ©e. Comme lui, Ă partir dâune rĂ©alitĂ© minutieusement dĂ©crite, il Ă©gare peu Ă peu son lecteur, toute certitude abolie. Trajet complexe et souvent dĂ©lectable.
Tous les hommes sont menteurs
MANGUEL Alberto