Tamouna va fĂȘter ses quatre-vingt-dix ans. Tandis que la fĂȘte se prĂ©pare, la vieille dame sâĂ©vade en pensĂ©e vers son passĂ©. Avec sa famille elle a fui la GĂ©orgie intĂ©grĂ©e de force Ă lâURSS dans les annĂ©es vingt, alors quâelle avait quinze ans. Son pĂšre, rĂ©sistant, a Ă©tĂ© fusillĂ©, ses grands-parents sont morts lĂ -bas et elle a perdu la trace de Tamaz, son grand amour dâadolescence. Bon an mal an, une vie dâexil sâorganise pour elle en France. En famille, sur plusieurs gĂ©nĂ©rations, elle traverse ainsi lâhistoire et les guerres europĂ©ennes dans une quotidiennetĂ© plutĂŽt douce, au sein dâun milieu immigrĂ© haut en couleur et solidaire. Dans le secret de son coeur cependant, elle rĂȘve toujours de la GĂ©orgie, ce « paradis perdu et obsĂ©dant », et Ă ses amours impossibles avec Tamaz.
Â
Ce tableau dâun exil ordinaire ne serait rien sans lâincroyable douceur qui Ă©mane de lâĂ©criture, sans la subtile alternance du âjeâ et du âelleâ dans la construction du rĂ©cit et lâhabile passage du passĂ© au prĂ©sent, sans cette petite musique de tous les jours qui rejoint peu Ă peu, au terme de la vie, les grandes pulsations de la nostalgie et de lâamour.