Monique, née à Hanoi, se souvient. Sa mère vient de mourir. Elle était ravissante, coquette, élégante, un oiseau des îles qui refusait son métissage, mal vu par la communauté des colons d’Indochine, ceux qui la fascinaient. Égoïste et indifférente au point de confier sa fille à sa mère vietnamienne, cruelle quand elle trouvait l’enfant trop typée et mal éduquée. Autour de la jolie poupée, Monique revoit son père jaloux et trompé, les domestiques méprisées et malmenées et surtout son grand amour, cette grand-mère exotique aux parfums d’épices et au coeur immense.
Dans les années quarante, sur fond de colonialisme et de guerre, des tableaux d’une autre époque font revivre une Indochine aux bouffées enivrantes d’odeurs et de bruits, victime de violence aussi : les Japonais envahissent le pays, le Vietminh se montre à découvert. Dans ce contexte historique, l’histoire d’une famille métisse, attachante, fort intéressante dans son réalisme se laisse envahir par celle des années-mère, l’histoire de la haine et du ressentiment. Dans un long monologue, Monique Thieu tente de comprendre et de cicatriser les blessures qui la minent. Un exorcisme par l’écriture.