AccrochĂ©s Ă des casiers de pĂȘche flottant au milieu de la mer, des bras sâagitent en vain, ignorĂ©s par des bateaux dĂ©jĂ remplis dâune prĂ©cieuse cargaison de thons. Ailleurs des enfants affamĂ©s virevoltent entre des voitures aux vitres obstinĂ©ment closes ; ailleurs encore des mĂšres porteuses fabriquent des bĂ©bĂ©s commandĂ©s sur catalogue par des couples stĂ©riles. Une vingtaine dâimages saisies sur le vif, autant de cris dâalarme.
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Nicole Malinconi dĂ©crit ainsi lâindiffĂ©rence de la sociĂ©tĂ© oĂč la richesse cĂŽtoie sans vergogne la misĂšre, oĂč le travail a changĂ© de valeur, oĂč lâhomme devient lui aussi un produit, oĂč le « chacun pour soi » permet de se rĂ©fugier dans une bulle de tranquillitĂ© sans entendre la dĂ©tresse des autres. Dans ses livres (Au bureau, NB novembre 2007), elle part de faits divers du quotidien pour constater sans acrimonie ni grandiloquence la triste rĂ©alitĂ© dâun monde dĂ©shumanisĂ©. LâĂ©criture Ă la fois tendre et subtile ne sâappesantit pas, suggĂšre seulement, par petites touches, et lâon se surprend Ă tendre lâoreille vers ces plaintes, avant quâelles ne deviennent inaudibles.