Sebastian Junger est un journaliste de terrain et partage au plus près la vie quotidienne de ses personnages. Dans La Tempête (NB octobre 1998), il s’agissait de pêcheurs, ici, ce sont les soldats américains basés dans la vallée de Korengal, au centre de l’Afghanistan. Il y a séjourné de longues périodes pendant un an, vivant avec eux, crapahutant comme eux, avec des risques identiques et le même inconfort. Technicité de la guerre, stratégie locale, géographie et moeurs tribales, tous ces aspects par ailleurs importants du document s’accompagnent d’une étude psychologique particulièrement poussée des soldats entraînés dans un conflit meurtrier, et déformés au point de ne plus vivre que par et pour lui. La géopolitique n’a pratiquement aucune place dans cet ouvrage, et l’analyse aurait pu être réalisée en d’autres temps et d’autres lieux auprès de n’importe quelle troupe d’élite combattant en territoire ennemi. La démonstration est rigoureuse, largement étayée, elle souligne l’importance du groupe considéré comme un ensemble et non comme une addition d’individualités. Remarquable à plus d’un titre, le livre envisage avec pessimisme le retour de ces hommes à une vie normale.
Être soldat en Afghanistan
JUNGER Sebastian