Au début des années 1980, Rocio et son brigadier de mari sont en poste aux confins du désert chilien, dans un village fantôme. Elle, fragile, la seule à y voir ses habitants misérables et ses chiens rôdeurs, a de plus en plus de cauchemars. Lui, préoccupé, s’inquiète aussi d’une vision récurrente, peut-être liée à un certain « docteur Tormento » ou à ses propres activités policières… Une tentative de fête au village accroît le malaise, la conduite de Rocio devient délirante et ses trajets apocalyptiques se succèdent jusqu’au vide définitif.
Dans un avant-propos, le jeune auteur, né après la dictature chilienne, dit comment son enfance s’est construite sur les souvenirs atroces des années de terreur, rappelées sans cesse. Il s’en libère dans ce premier roman où de tout petits enfants esprits (ceux que Rocio n’a pas eus ?), à la fois tendres et tourmenteurs, suivent et décrivent leur mère dans un parcours onirique que la folie, la peur, la torture éclairent de lueurs furtives et blafardes. La beauté de l’écriture, tour à tour familière, baroque, hallucinée, poétique, aide à affronter l’incohérence apparente du récit. Dans la féconde Amérique latine, un écrivain est né.