Depuis cinquante-trois ans, Ananda Devi Ă©coute des hommes qui lui parlent. Dans ce rĂ©cit autobiographique oĂč elle entend Ă nouveau leurs paroles, passĂ© et prĂ©sent enchevĂȘtrĂ©s rĂ©sonnent. De son pĂšre elle a retenu la douceur, la transmission des nĂ©vroses et des angoisses familiales, lâabsence de joie. Fils au jugement dĂ©vastateur et Ă©clairant, compagnon spectateur, auteurs vivants ou morts, tous ont Ă©veillĂ© la conscience de cette femme exigeante et lucide. En se dĂ©pouillant de son humilitĂ© imposĂ©e, en choisissant lâĂ©loignement, la solitude, elle accĂšde Ă une reconstruction salvatrice dans la souffrance et Ă la vĂ©ritĂ© de son identitĂ©, authentiquement littĂ©raire.
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Ce parcours elle le raconte dâune Ă©criture magique dans un jaillissement dâimages. Odeurs, paysages, Ă©motions, sensualitĂ© dessinent l’Ăźle Maurice dĂ©jĂ si prĂ©sente dans Le sari vert (NB novembre 2009). Des phrases Ă la structure originale, musicale, traduisent une subtile et envoĂ»tante analyse psychologique ; dans cette introspection inflexible qui lâeffraie, elle se met en scĂšne, en miroir ; elle mĂ©dite aussi sur la crĂ©ation littĂ©raire portĂ©e par un sens permanent de lâĂ©merveillement. Car câest finalement Ă ces hommes bavards et envahissants quâelle doit son affranchissement, son ancrage libĂ©rateur dans lâĂ©criture.