La narratrice est une fillette réservée; tellement réservée qu’elle ne manifeste aucun sentiment, ni ne parle. Déroutant et inquiétant pour ses parents, qui l’entraînent chez les docteurs, en vain. Mais en fait, rien de grave dans ce silence: la fillette attend son heure, ou peut-être juste un moment calme, un partenaire qui met en confiance. Comme ce petit garçon qui parle peu: c’est le déclic pour que se mettent à couler toutes les histoires qu’elle avait en elle.
Histoire destinée à rassurer les enfants timides et peu bavards, ou leurs parents? En tout cas une jolie histoire, racontée avec tendresse et sensibilité, avec des mots choisis et qui sonnent juste. Le (séduisant) graphisme stylisé d’Alexandra Pichard met en valeur la fillette, figure simple et attachante, et son petit compagnon; elle fait ressortir leur singularité -et leur isolement- en réduisant leurs familles ou autres protagonistes de passage à des silhouettes esquissées d’un trait noir, se fondant dans le décor uni. Excepté sur la dernière page, qui voit la narratrice se lancer dans le « grand bain » des relations humaines: tous ont alors droit à leurs couleurs et à leur épaisseur.