Nelly Arcan, Ă©crivain et prostituĂ©e, se suicide en septembre 2009. Dans ses derniers Ă©crits, elle revient sur sa jeunesse et ses rapports avec sa mĂšre. Elle analyse aussi quelques Ă©vĂ©nements comme son interview de 2007 dont elle sort humiliĂ©e. Le corps dâadolescente honni a fait place Ă une burqa de chair, enveloppe transformĂ©e par la cosmĂ©tique et la chirurgie esthĂ©tique. Ce corps, quâelle exĂšcre dâabord avant d’en ĂȘtre prisonniĂšre, elle le prostitue sans savoir quâen se dĂ©shabillant, elle va se dĂ©sincarner.
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Dans ce recueil protĂ©iforme sâenchaĂźnent lâessai et le rĂ©cit biographique en passant par la chronique, avec pour tristes dĂ©nominateurs communs : le manque, le vide et la mort. La langue de la QuĂ©bĂ©coise est Ă©laborĂ©e et puissante : la violence crue alterne avec la froideur et la luciditĂ© de lâanalyse. Et toujours cette prĂ©sence dâimages Ă©tonnantes et dĂ©tonantes (Ă ciel ouvert, NB octobre 2007), aiguisĂ©es pour mieux trancher. LâĂ©rotisme liĂ© Ă lâactivitĂ© de la jeune femme est Ă©vacuĂ© pour laisser place Ă un dĂ©senchantement qui nâĂ©pargne rien : fĂ©minitĂ©, maternitĂ©, sexualitĂ© masculine, devenir de lâhumanitĂ©âŠ. Une prose fine rĂ©vĂšle une femme, Ă la fois rĂ©voltĂ©e et dĂ©faitiste, qui se consume et dont la seule faute a Ă©tĂ© dâen trop (sa) voir.