La tristesse durera toujours

Yves, la cinquantaine, se souvient. Sa jeunesse à Nevers ; sa naissance illégitime ; l’absence de père ; son enfance « bousillée » par la bâtardise ; la pauvreté digne et triste… Mais surtout Mme G., vieille dame adorée, presque le sosie de Madeleine Renaud, qui, le dimanche, les recevait lui et sa mère – elles étaient institutrices – dans sa maison de La Charité-sur-Loire. Elle est morte maintenant, sa mère aussi. Le bon élève de jadis, désormais professeur à Toulouse, revient inlassablement sur les lieux de son enfance. Yves Charnet (Lettres à Juan Bautista, NB mai 2008) veut désespérément écrire sur son étrange premier amour… Quand Madame G. lui échappe, il la retrouve à travers ceux qui ont compté pour lui : c’est à Van Gogh, cité par Maurice Pialat – l’ami cinéaste admiré sans mesure –, qu’il emprunte son titre. Baudelaire est au zénith de son panthéon, Nougaro n’est pas loin qui lui inspire style syncopé et mots nouveaux. Des phrases courtes, hachées, qui se heurtent, se bousculent, mais toujours proches – paroles de chansons populaires citées en passant, mine de rien, phrases et temps fracturés pour un homme en plein désarroi. Récit sensible, imagé, profond, qui ne peut laisser indifférent.