Babbo (« papa » en Italien), câest ainsi que le narrateur nomme son pĂšre, cet homme charmeur, interlope peut-ĂȘtre, trop souvent lointain, et somme toute indĂ©chiffrable, quâil va tenter de comprendre pendant quelques jours de voyage. LâĂ©tĂ© commence Ă peine. Depuis le Var, ils vont tous les deux « monter » par Ă©tapes successives jusquâĂ Paris. Et câest le bras Ă la fenĂȘtre pendant de longues heures Ă bord dâune Fiat Panda dĂ©capotable que le fils regarde dĂ©filer les paysages le long des nationales et se laisse aller Ă ses souvenirs⊠Par petites touches se dessine alors le portrait de sa mĂšre et de sa trĂšs chic Bonne-Maman. Et peu Ă peu Ă©galement, ce fameux Babbo, gentiment mĂ©prisĂ© pour ses inconsĂ©quences, ses absences et Ă©checs Ă rĂ©pĂ©tition, semble prendre de lâĂ©paisseur. Peut-ĂȘtre lâamorce dâun amour filial⊠Mais comment faire disparaĂźtre la gĂȘne un peu oppressante de leur huis clos, leur difficultĂ© Ă se rejoindre, leurs questions sans rĂ©ponse ? Yvan Macaux laisse libre cours Ă sa crĂ©ativitĂ© nourrie de son expĂ©rience de cinĂ©phile ; ainsi ce roman en forme de road-movie ou road-trip devient-il prĂ©texte Ă une envolĂ©e littĂ©raire rythmĂ©e, presque « rappĂ©e », oĂč lâhumour se pique dâĂ©rudition. Au fil des pages il jongle avec les mots, les calembours et les Ă©motions, nâhĂ©sitant pas Ă mĂ©langer les genres et les formes : il cite Zweig et nâaime pas Lady Di ; il admire de Gaulle et sâamuse des sĂ©ries tĂ©lĂ©. Sa culture de (presque) trentenaire, reporter Ă la tĂ©lĂ©vision, est kalĂ©idoscopique tandis que son style vif a des embardĂ©es de vraie rĂ©flexion et de profondeur au dĂ©tour dâaphorismes tel celui-ci qui rĂ©sume bien le livre : « On a ses parents trop tĂŽt. Quand vient le temps on ne peut que ramasser Ă la main les fragments de nos pĂšres ». Ce premier roman, sur le terrain â maintes fois arpentĂ© â des incomprĂ©hensions familiales, est un galop dâessai trĂšs rĂ©ussi. Intelligence et fantaisie riment avec tendresse et nostalgie. Ă la critique acerbe se mĂȘle aussi, peut-ĂȘtre, une forme dâhommage au pĂšre disparu.
Il Babbo
MACAUX Ivan