Mars 1994. Alors que le siège de Sarajevo s’éternise, un groupe de jeunes Serbes visite Moscou. Parmi eux, Ana, brillante étudiante en médecine. Troublée par une discussion politique, elle quitte ses amis et se rend seule chez un photographe russe rencontré dans un club. Fortuitement, l’homme découvre qu’elle est la fille de Ratko Mladić, le “Boucher de Bosnie”. Le flirt tourne court. De retour à Belgrade, la jeune femme mortifiée se résout à remettre en cause l’admiration aveugle et l’amour inconditionnel qu’elle a toujours portés à son père. Dramaturge, la romancière catalane (Coeur de napalm, NB mars 2012) transforme la fin pathétique de la fille du tortionnaire en tragédie shakespearienne moderne. Le contexte historique complexe, l’horreur des guerres en ex-Yougoslavie, sont utilement retracés dans des chapitres intercalés avec le récit du drame vécu par l’héroïne. Le narrateur raconte les faits en historien. Peu à peu, il se dévoile comme un personnage à part entière, et livre en contrepoint sa propre histoire : un fils qui a mal aimé son père et comprend son erreur trop tard. Deux destins inverses se croisent inéluctablement dans ce beau roman sensible basé sur une histoire vraie, servi par une écriture subtile, sans pathos, très prégnante.
La fille de l’Est
USÓN Clara