Eddy est un garçon dâune dizaine dâannĂ©es, nouveau dans le collĂšge dâun village dĂ©shĂ©ritĂ© de Picardie. DĂšs le premier jour, il subit la violence de deux grands : « Câest toi le pĂ©dĂ© ? ». Il raconte sa peur, les coups reçus, son dĂ©sarroi, sa honte et celle de sa famille, ses tentatives dĂ©sespĂ©rĂ©es pour « ĂȘtre un dur », la dĂ©couverte de son attirance pour les garçons, le dĂ©goĂ»t de soi, lâinacceptable diffĂ©rence pour ce milieu populaire oĂč la virilitĂ© va de pair avec lâalcoolisme, la brutalitĂ©, la domination de la femme. Ce garçon nâest autre que lâauteur. Câest toute la force de ce rĂ©cit, rencontre de deux mondes dont la diffĂ©rence est soulignĂ©e par lâalternance de deux langages: lâun, en italique, souvent vulgaire, blessant, trivial, est le reflet de la vie du petit village et de lâatmosphĂšre familiale, lâautre, pudique, distanciĂ©, est une narration claire, factuelle et sans recherche dâeffets, des blessures morales et physiques infligĂ©es. Certaines scĂšnes sont dâun rĂ©alisme terrible. Ce nâest pas un rĂšglement de comptes mais un constat dâĂ©chec qui se termine par une fuite de ce monde peu instruit oĂč rien ne pourrait changer. Le procĂ©dĂ© littĂ©raire est criant de vĂ©ritĂ©, mĂȘme sâil stigmatise. La concision explicite de ce premier « roman » impressionne.
En finir avec Eddy Bellegueule
LOUIS Ădouard