Avons-nous assez navigué

À l’Opéra, Viviane écoute « Eugène Onéguine », l’histoire d’un amour manqué, d’après le roman de Pouchkine. Elle se retourne, reconnaît Antoine, oublié depuis trente ans ! Il fut l’ami d’enfance, le cavalier rassurant de sages sorties dans les années soixante, le confident d’un bref mariage. Lui, le jeune et brillant médecin envoyé en Algérie, a ignoré ou refusé ses avances. Qui est cet homme retrouvé au moment où Viviane se partage entre son métier de libraire et celui de grand- mère ? Elle en parle avec sa meilleure amie, le témoin de vie, qui sait tout d’elle et qu’elle croit connaître… C’est cette amie, la narratrice, qui mène le jeu dans ce roman à trois personnages et contraint l’héroïne à se dévoiler, à découvrir l’ambivalence de ses sentiments, à analyser les situations dont elle a voulu ignorer la réalité, à se juger dans son monde d’illusions. De multiples citations de Pouchkine accompagnent ces temps d’introspection et de souvenirs. D’une écriture sensible, élégante et précise, l’auteur de Ce qu’en dit James (NB octobre 2007) brode avec subtilité sur les intermittences du coeur d’une femme au douloureux réveil. Un livre empli de charme et de nostalgie.