Prends ta pelle et ton seau

GIRAUD Hervé

Anton Tchekov ! Il porte un nom cĂ©lĂšbre, donnĂ© par sa mĂšre qui l’a jetĂ© sur terre un matin puis est morte d’overdose quelques jours plus tard, lui lĂ©guant en hĂ©ritage son absence et un exemplaire du Livre de la Jungle. Il vit sur une barge dans un bras mort et nausĂ©abond de la riviĂšre qui traverse Fourminex, la ville sinistrĂ©e par la fermeture de l’usine d’électromĂ©nager. Pour toute famille : un « beau-pĂšre –tiers –de-confiance Â» devenu chĂŽmeur alcoolique Ă  qui l’a confiĂ© le juge de tutelle. À 16 ans, rebelle affublĂ© d’une radieuse crĂȘte d’iroquois rouge, Anton s’apprĂȘte Ă  faire son premier casse pour le compte de deux petits malfrats, Kleber et Wilbur. NaĂŻf, malhabile, loser, Anton se fait immĂ©diatement serrer par la police.

Sans repĂšres familiaux ni sociaux, taraudĂ© par la blessure profonde laissĂ©e par l’absence de la mĂšre, Anton brave crĂąnement la noirceur de ses jours et le destin tout tracĂ© de petite frappe qui l’attend. Cela va vite, au rythme des faits qui percutent comme les jours qu’il passe au plus profond de sa galĂšre. L’écriture vive, impulsive, est bourrĂ©e de traits d’humour sous-jacents, chaque phrase dĂ©note un regard pointu sur la vie, les adultes, les administratifs, la police, la situation des enfants en mal d’affection et d’encadrement, le climat social dĂ©lĂ©tĂšre. Un regard sur lui-mĂȘme aussi, qui lui permettra de s’en sortir avec les honneurs, et l’espoir d’un autre avenir. Un mĂ©lange entre Eddie Belle Gueule, et le gamin de La vie devant soi de Romain Gary/Émile Ajar. Passionnant, prenant, drĂŽle, Ă©mouvant : un plaisir rare de lecture. (M.T. et M.D.)