Peu après le 7 janvier 2015, Bérangère Lepetit, journaliste au Parisien, s’immerge quatre semaines en intérim chez Doux qui abat et conditionne massivement des poulets halal bas de gamme pour l’exportation. Huit heures d’affilée à la chaîne, elle met en cartons des volailles. Collègues payés au SMIC – rarement syndiqués par peur du licenciement et du chômage –, gestes répétitifs, souffrance physique et nerveuse, cadences démentielles, bruit insupportable et, en fin de journée, le supermarché Leclerc de Châteaulin pour tout horizon… L’expérience, rude mais rendue supportable par sa brièveté, confère une acuité accrue au regard de la jeune femme et confirme ce qu’elle pressentait : la classe ouvrière est toujours une réalité, émiettée, précarisée par les CDD ou intérims aléatoires, presque sans espoir, broyée par la mondialisation, éliminée par l’automatisation – et très dépolitisée. Ton direct et chaleureux, propos très clair, et détails bien observés donnent vie à cette expérience, enrichissante aussi pour le lecteur. Et la journaliste sait rester modeste. (L.G. et M.-C.A.)
Un séjour en France : chronique d’une immersion
LEPETIT Bérangère