Cette vieille dame que l’on appelle Grand-Mère Crevette est une SDF, habituée du quartier. Elle tire une ficelle derrière elle, où il y avait jadis un chien. Son amoureux aussi est parti, et elle se sent bien seule. Elle paye les commerçants bienveillants en pois cassés, et déguste son chocolat face à la mer. Celle-ci miroite tant que ça lui donne envie de s’y baigner – à la saumonette du poissonnier aussi. Dans l’eau, elle est bien, elle peut rêver tout son saoûl.C’est une histoire bien sous tous rapports, humaniste et sans préjugés, poétique et idéalisée, au texte tendre. Mais l’image ne facilite pas son appropriation, avec son parti-pris déconnecté de la réalité, son onirisme, sa froideur distanciée. En rouge, bleu et blanc, au stylo, elle ne manque cependant pas de finesse, de style et de personnalité. Sur une esquisse de décor géométrique, elle portraiture une vieille dame qui ressemble à la reine d’Angleterre (afin de signifier que tout être a sa dignité ?), avec son bibi et son sac de course imprimé du drapeau britannique, et convoque les disparus et les imaginés – jusqu’à en perdre le lecteur, égaré par une équipe de foot suivie d’un pingouin. Pour lecteurs aguerris. (M.D.)
Grand-Mère Crevette
ZIMMER Marie, DRAGO Isabelle