Salto. L’histoire du marchand de bonbons qui disparut sous la pluie

Livreur de bonbons atypique, Miquel a horreur de faire payer les factures. Quand sa voiture tombe en panne, il utilise la camionnette de son entreprise pour emmener à la plage ses enfants, gavés de confiseries et ravis de l’aubaine. Toujours gai, amical et à l’écart des problèmes, il déroule de fête en fête une vie insouciante de mari comblé et de père de famille heureux, en dépit des avertissements de son épouse Ana. Lors de son licenciement, devenu inéluctable, l’actualité lui suggère un nouveau travail. Au Pays Basque, les responsables publics veulent être protégés des menaces de l’ETA. Le métier de garde du corps est en pleine expansion. Peut-être lui donnera-t-il en plus un sujet pour le livre qu’il rêve d’écrire. Malgré son horreur des armes, il est vite embauché, après un entretien expéditif.  Le lendemain, dès six heures, le voilà muni d’un pistolet avec un chargeur de vingt-cinq cartouches et flanqué de Rose, son équipière bourrue. Une nouvelle vie commence : beaucoup d’attente, du danger et, surtout, des horaires imprévisibles et pas de temps à consacrer à la famille.  Les personnages de ce beau récit sont tous attachants et vrais, avec une mention particulière pour le patron de l’agence de vigiles, aussi hyperactif que le ministre de Quai d’Orsay. Routine, peur, attentats, menaces de mort se succèdent dans un scénario riche et prenant, où l’on voit le tempérament de Miquel se forger au contact des difficultés et de rares moments de calme. Doux, gais ou tendres, sombres, explosifs ou dépressifs, les crayons de couleur savent traduire tous les caractères. Judith Vanistendael les qualifie de « versatiles et expressifs ». Elle souligne aussi le côté physique du travail « car il faut appuyer très fort sur les crayons pour bien faire ressortir les pigments ». Le résultat est à la hauteur de ses attentes. Le procédé d’impression employé – la risographie – donne aux images un rendu original, particulièrement remarquable dans les nombreuses doubles pages qui enrichissent ce bel ouvrage. (P.P. et C.D.)