1996. Dans un pub anglais, face à son bourbon habituel, Robert Bradley, alias Bibow, se souvient : sa naissance en 1947 dans un patelin perdu de l’Illinois, son père, unijambiste rescapé de la guerre de Corée et poivrot invétéré, son grand-père borgne après le débarquement en Normandie, grand buveur lui aussi, ses conflits perpétuels avec son institutrice, bref ses « années de merde ». Et puis son indifférence totale au monde qui l’entoure. Jusqu’à sa convocation pour faire la guerre au Vietnam. Pourquoi ne pas devenir un héros comme son père et son grand-père ? Adaptée du roman éponyme d’Axl Cendres, cette histoire n’est pas la comédie sentimentale suggérée par la couverture, mais le récit pathétique de la vie d’un jeune paumé au milieu d’arriérés, au fond de l’Amérique des années 60. Mais son défaut génétique et la CIA vont la transformer : cynisme, violence puis humanisation dans l’Amérique du Vietnam, mais aussi de Woodstock. Dans le cadre de cette Amérique stéréotypée, le dessin réaliste de Nicolaï Pinheiro, presque ligne claire, s’adapte à chaque situation : sombre au Vietnam, glacé en URSS, joyeusement coloré à Paris. Les visages, parfois à la limite de la caricature, sont très expressifs et donnent à cette BD un cachet particulièrement réussi. (C.D. et D.L.)
La drôle de vie de Bibow Bradley
PINHEIRO Nicolaï