À cinquante-quatre ans, il est célibataire, cadet d’une fratrie de cinq garçons dont les parents, originaires d’un petit village marocain, ont émigré en Belgique. Il perd son père à sept ans et sa mère analphabète doit élever seule ses enfants. Maintenant, il est professeur de lettres à l’Université de Louvain et vit auprès de celle dont la santé, à quatre-vingt-treize ans, décline vite. Alors qu’il est à son chevet, il s’interroge sur ses sentiments pour elle à travers l’évocation de souvenirs d’enfance. Voici un court premier roman très réussi, vraisemblablement autobiographique, sur l’amour filial et maternel, d’un universitaire islamologue dont l’oeuvre comprend déjà de nombreux essais et une pièce de théâtre. Il nous offre d’abord un superbe portrait de femme, tout en nuances et plein de charme, doublé de la peinture d’une belle âme dont les qualités de coeur – bienveillance, altruisme chevillé au corps et vaillance assumée – forcent l’admiration. L’auteur, qui fait un courageux retour sur lui-même (n’a-t-il pas été parfois honteux d’elle ?), invite à une réflexion sur la difficulté de passer d’une culture à l’autre et la nécessité de se regarder en vérité. Un livre fin, profond, émouvant, bien écrit qui fait du bien. (L.K. et D.D.)
Ainsi parlait ma mère
BENZINE Rachid