« Nous habitions au numĂ©ro 10 de la rue, dans un lotissement de maisons mitoyennes Ă deux Ă©tages. » Lâautobiographie de Lorenzo commence ainsi par une trĂšs classique Ă©vocation de son enfance et dâun Ă©vĂ©nement important pour le petit garçon quâil Ă©tait : lâarrivĂ©e de nouveaux voisins. Un homme ou une femme ? Avec ou sans enfants ? Ce souvenir vacillerait-il, comme tout ce qui suit dâun rĂ©cit de vie couvrant les annĂ©es jusquâau moment de lâĂ©criture ?
Explication trop simple : les hĂ©sitations de la mĂ©moire ne sont pas la clef de ce roman. Certes nous nâavons quâune vie et la rĂ©alitĂ© nous impose de renoncer Ă toutes celles qui nous auraient tentĂ©s. Qui dĂ©cide ? La littĂ©rature peut balayer avec dĂ©sinvolture cette assignation. Chapitre aprĂšs chapitre, la ligne narrative ouvre sur une arborescence : le Mexique avec Lorenzo ou la vallĂ©e natale de Chantebrie avec le mĂȘme Lorenzo. Au choix ! Le roman se dĂ©ploie ainsi sans renoncement : rĂ©cit dâenfance, roman dâaventure dans un Mexique baroque Ă souhait, roman noir avec meurtre, roman dâamour dĂ©licieusement trompeur, en un jeu dâĂ©criture qui superpose les lignes, jouant sur les consignes de saut de page donnĂ©es par le narrateur pour suivre ici ou lĂ le pĂ©riple multiple du hĂ©ros. On se passerait presque des interventions de lâauteur-narrateur qui explique sa stratĂ©gie car on se perd avec plaisir dans ce jeu de piste. (C.B. et S.H.)  Â