Nicola parle Ă Nicola, raconte son enfance, sa vie Ă lâasile, au fil des jours, comme des bribes de souvenirs : il est nĂ© « dans les annĂ©es soixante, les fabuleuses annĂ©es soixante », les annĂ©es Bardot rythmĂ©es par Coquillages et crustacĂ©s. Son avenir est dĂ©crĂ©tĂ© par son institutrice : « Il est faible du cerveau⊠Câest la brebis galeuse. ». Tout au plus sa grand-mĂšre diffĂšre-t-elle lâĂ©chĂ©ance en offrant des Ćufs frais aux autoritĂ©s alentour. Mais, bien vite câest « lâinstitut des fous » oĂč sa mĂšre est enfermĂ©e : visiteur dâabord, pensionnaire ensuite. Avant, il y a eu lâĂ©cole et Marinella quâil a voulu Ă©blouir en « faisant un geste hĂ©roĂŻque » : manger une araignĂ©e vivante⊠un dĂ©fi dont les dĂ©tails lâont conduit Ă lâasile. Il a neuf ans⊠puis trente-cinq ans.
Ce roman est un long monologue thĂ©Ăątral dĂ©coupĂ© en trois actes, au long desquels Nicola, le narrateur, dialogue avec Nicola dans un dĂ©doublement Ă©trange qui trompe la solitude oĂč le contraint lâinstitution : un discours fou dont chaque voix propose une variante de lâĂ©vocation de la vie quotidienne dĂ©sespĂ©rante dâun centre psychiatrique dâun autre temps. Insoutenable ? Non parce que la force de lâĂ©crivain- et de son personnage- est de poser sur ce monde un regard dĂ©calĂ©, dâune logique dĂ©lirante, dâune cohĂ©rence dĂ©sarmante et poĂ©tique. Ce monde, câest aussi la sociĂ©tĂ© de consommation vue Ă travers ses supermarchĂ©s que lâinnocence du « fou » dynamite dâun regard ravageur dâune drĂŽlerie explosive. AnnĂ©es soixante : la folie collective en marche ? (C.B et S.H)