Sara nous a quittés, elle qui suggérait et racontait dans le silence et l’austérité du papier qu’elle déchirait pour créer images et albums…
Ils demeurent, grands témoins de son œuvre inclassable ; car là, s’y racontent, au fil des pages, des vies entières, humaines et animales, sans qu’un seul mot, le plus souvent ait besoin d’être dit. La force de création de Sara est comprise entre ces silences, dans la magie de ses personnages de papier, figurants d’un vaste scénario, comme une spirale d’individualités qui déambulent et s’entrecroisent, livre après livre, page après page, filmés au plus près.
In : C’est mon papa – éditions l’Art à la Page, 2011
Il est question de solitudes habitées (Elle et moi), de rencontres aux allures clandestines (À travers la ville, À quai, Le rat musicien), de périls surmontés (Éléphants), d’affections contenues (C’est mon papa), d’amours qui s’attendent (Je suis amoureux), qui se trouvent (Joséphine au restaurant), d’engagements (Révolution), de naissances (Volcan), de mort (Du Temps).
Si plus tard, sa gamme de couleurs s’élargit, c’est pour illustrer fables (La Fontaine) et contes classiques dans lesquels on retrouve des forêts profondes, des deuils, des solitudes, un roi en colère, un prince métamorphosé, une belle-mère jalouse et cruelle, des destins empêchés…
Mais que l’on soit dans l’univers de ses tableaux, de ses films, de ses albums, dans ses décors de forêts, de villes ou de ports, l’œuvre de Sara tourne autour de ce questionnement essentiel : la relation à l’autre et à soi-même.
Comment s’effectue la rencontre ? Comment dialoguer ? Quelle est la nature réelle de l’Être Humain ? De l’animal ?
La réponse se profile parfois, mais le plus souvent reste en suspens, comme un miroir tendu au lecteur, comme cet « autre côté du miroir » si cher à Sara.
Mth Devèze, l’Art à la Page