Pendant le confinement, la narratrice quinquagénaire affiche son « besoin du silence du monde pour voir l’invisible ». Elle égrène tout autant qu’elle convoque vingt ans de souvenirs à proximité d’une grand-mère dévouée et discrète dont elle avoue méconnaître de grands pans de l’existence. Elle part à la découverte de ces manques.
Dans une belle langue, subtilement imagée, l’auteure nous fait partager sa quête, trente ans après la disparition de son héroïne. Elle consacre une partie, assez touchante, aux faits et constatations observés auprès de cette femme ordinaire du XXe siècle, soumise et souvent silencieuse, qui ont marqué les vacances de son enfance franc-comtoise. Puis elle nous entraîne dans un chantier de recherches généalogiques foisonnant qui dévoile un orphelinat franc-maçon du XXe arrondissement parisien. Enfin s’ouvre le champ de la fiction qui dessine à cette grand-mère « si normale » un destin extraordinaire. Cette habile construction, même si elle crée quelques redites, maintient un plaisir de lecture soutenu. De révélations familiales, illustrées de photos, en existences imaginées, mêlant étroitement Histoire et vie quotidienne, ce récit original, fluide et romanesque à la gloire des vies simples à l’opposé des femmes puissantes, suscite intérêt et émotion. (J.D. et M.Bo.)