Femme pour moitié

MURUGAN Perumal

Dans une communauté tamoule au sud de l’Inde, Kali et Ponna, mariés depuis douze ans, forment un couple fusionnel. De leur union, encore aucun enfant n’est né en dépit des innombrables prières, pèlerinages, potions et offrandes. Les langues vont bon train pour stigmatiser, isoler, humilier le couple et inciter le mari à prendre une seconde épouse. L’ultime option serait de participer au festival célébrant une divinité locale, pendant lequel les femmes stériles sont autorisées à avoir une relation sexuelle avec un inconnu censé incarner un dieu.

Cette fable vibrante met en scène le carcan religieux de la société indienne dans les zones rurales en illustrant le sort réservé à des paysans modestes et travailleurs dans l’incapacité de procréer. Perumal Murugan dépeint avec une simplicité touchante les activités d’une communauté rurale traditionnelle, leur amour de la nature, leur proximité avec les animaux. Mais il révèle aussi les angoisses et tensions au sein du couple infertile et les diktats de la convention sociale, un miroir d’une société indienne stratifiée, enfermée dans sa logique de castes. Les nationalistes hindous ont accusé l’écrivain d’avoir, par ce texte, cherché à dénoncer certaines pratiques religieuses et ont empêché la diffusion de cet ouvrage, condamnant l’auteur à une mort littéraire. Sa victoire juridique contre les fondamentalistes et les communautés locales aux fortes traditions patriarcales porte cette voix jusqu’à nous. (S.D. et M.S-A.)