Captif de l’oubli (Cosmopirates ; 1)

JODOROWSKI Alexandro, WOODS Pete

Dans une galaxie sous la coupe des Magnobankiers, sept despotes mi-humains, mi-machines qui dictent leur loi par la force et la finance, Xar-Cero est un guerrier redoutable. Après un combat triomphal dans une arène, il est recruté de force pour une mission à l’ampleur terrifiante : raser la planète Samppa grâce à une arme ultime. Aveuglé par sa loyauté et la promesse d’une immense récompense, il obéit… jusqu’au moment où la réalité de son acte le rattrape. Rongé par la culpabilité, il tente de se rebeller, mais ses maîtres ne lui laissent aucune chance. Plutôt que de l’éliminer, ils manipulent sa mémoire et le condamnent à une existence interminable, persuadés qu’avec le temps, il finira par leur ressembler.

Alejandro Jodorowsky reprend quelques thèmes majeurs : la quête initiatique, le pouvoir absolu et la corruption morale – dans une fresque galactique qui veut dénoncer l’oppression économique. Mais l’exécution manque de subtilité. Les dialogues manquent totalement de profondeur et de finesse et ressemblent à une parodie du genre. Les personnages manquent de nuances et sont trop caricaturaux : Xar-Cero, censé être le héros tragique, semble naviguer d’une impulsion à l’autre sans réelle évolution psychologique. Le récit ne prend pas son temps. Tout va trop vite, le rythme est frénétique, enchaînant les scènes sans leur laisser le temps de s’installer, ce qui dilue l’impact des enjeux et rend difficile l’immersion.

Si le scénario laisse perplexe, le travail de Pete Woods est, lui, irréprochable. Chaque planche regorge de détails et d’inventivité, des designs de vaisseaux aux paysages stellaires, en passant par les créatures mécaniques qui peuplent cet univers. Le « character » design, particulièrement soigné, donne du charisme aux figures d’autorité, même si leur personnalité reste limitée par l’écriture.En somme, Cosmopirates propose un décor visuel spectaculaire mais peine à donner une profondeur à son récit. L’idée de départ, ambitieuse, se heurte à un traitement maladroit où l’excès prend trop souvent le pas sur la nuance. Reste un album graphiquement impressionnant, qui pourra séduire les amateurs de space-opera grandiloquents, à condition d’accepter ses défauts narratifs.

(BB)