Le philosophe Tristan Garcia (Nous, NB janvier-février 2017), dans une suite de onze récits de longueurs très inégales situées du néolithique au Xe siècle, parcourt le Moyen Orient et l’Extrême Orient en s’intéressant à des âmes indifféremment humaines ou animales qui se retrouvent dans différentes situations. C’est une sorte d’épopée étonnante en hommage aux oubliés, aux meurtris, aux abandonnés qui se complaisent dans la malédiction qui les accable mais aussi une fresque étrange et délirante dessinée pour les morts anonymes depuis l’origine de l’univers. Étrange car, si le style est agréable et l’érudition incroyablement vaste, la lecture est pénible tant elle se traîne en permanence dans le glauque, l’ordurier et le scatologique, tout en étant parfois rendue malaisée en raison d’un orientalisme résolument affiché mais superbement décrit. Délirant car, s’élevant contre les idées reçues, Tristan Garcia prend tout à contre-pied et bouscule les règles établies, faisant par exemple de la lèpre un moyen de se libérer de toute contrainte, tout en parsemant son livre d’aphorismes bienvenus auxquels on souscrit sans réserve. C’est une oeuvre extrêmement originale dont la lecture demande du temps et de l’obstination. (J.M. et M.-N.P.)
Âmes (Histoire de la souffrance ; 1)
GARCIA Tristan