Deux sœurs étudiantes, Andrea, lanceuse de poids, et Ezia, ethnologue, se rendent au point de départ du pèlerinage de Nossa Senhora do Jabuti Queimado (Notre Dame de la Tortue Calcinée) pour porter à la Vierge les vœux de plusieurs proches. Ceux-ci ne seront exaucés que si elles parviennent à les déposer au kiosque de verre où est conservée la statue sans avoir lâché la corde au long des trente kilomètres qui y mènent depuis la ville universitaire de Macoder.
Traversant une ville étouffante, Michel Jullien (L’île aux troncs, Les Notes novembre 2018) embarque avec ses héroïnes, dans le car bondé qui mène au point de départ du pèlerinage où une foule compacte, bruyante et odorante se presse. Puis, tout en suivant au plus près les mains des deux jeunes femmes, les pieds dans la boue, angoissées par la peur d’abandonner la corde ramollie par la pluie, il donne vie avec une truculence rabelaisienne aux divers personnages qui les entourent et leur font parfois obstacle. Chemin faisant, il reconstitue à sa façon la miraculeuse apparition d’une Vierge éclopée qui ressemble fort à Notre Dame de Nazareth dont le pèlerinage attire chaque année à Belém (Brésil) des millions de personnes. Un récit picaresque au style saisissant, coloré, extrêmement élaboré et qui, au travers de deux portraits de femmes, donne avec empathie une vie intense à une humanité affairée et grouillante. (C.P. et H.V.)