Le Singe, le Tronc, le Fils, l‘Ombre : trois bourreaux et une victime du conflit serbo-croate. Quelques années plus tard, le Singe, exilé à Nice, meurt dans la déchéance ; le Tronc, démembré par une bombe, croupit dans une cellule ; le Fils a été égorgé. L’Ombre, la jeune fille de treize ans, violée et assassinée, hante ses tortionnaires. A capella, chacun murmure sa lugubre mélopée.
L’auteur, né en Bosnie, déserte l’armée croato-bosniaque en 1992 et se réfugie en France. Par ses textes, il préserve la mémoire des victimes de tous les conflits (cf. Les Bosniaques, NB décembre 1994). Ce roman, qui se passe en Bosnie, est un réquisitoire implacable contre la guerre. Celle-ci révèle chez l’homme tout ce qu‘il y a d’abject et de bestial. Crimes, viols se perpétuent avec barbarie. Seule, la jeune fille parvient à éveiller, mais à peine, la conscience de ses bourreaux. La réalité, si tangible derrière cette « fiction », rend la lecture difficilement supportable. La crudité des dialogues, la brutalité des scènes dotent ce court récit d’une terrible force de frappe.