Une voix intérieure peut-être, à moins que ce ne soit un cri : elle dit le mal-être d’une jeune femme qui ne peut sortir du refuge sans joie de son lit. Elle dit les résolutions qu’elle prend tous les jours pour s’en extraire et pour faire les choses « bien ». Pour quel quotidien ? au sortir d’un lit plein de miettes et de poils de son chat, dans ses « Docs aux semelles élimées » elle sait bien que « c’est pas aujourd’hui qu’on participe au PIB » quand « le titre de séjour a encore expiré »…
Voilà pour le profil tristement banal de celle qui parle et dont on comprend au fil de sa voix les raisons objectives d’une évidente déprime. On peut lire mille textes sur ce thème. Mais la voix que fait entendre Salim-A Attalah Chettaoui sublime ce « sujet » : poète, nourrie de Verlaine, Rimbaud, Baudelaire, Apollinaire, Artaud et d’autres qui ont chanté leur spleen ou leur mal de vivre ou leur folie ; elle leur succède dans une autre tonalité, celle du slam, plus rauque, plus rythmée, qui fait entendre la musique d’aujourd’hui ; elle leur succède et intègre librement des bribes de leurs poèmes dans le sien. Un jeu brillant, d’une grande inventivité verbale dans l’emploi du langage quotidien comme dans l’utilisation de termes recherchés. Un poème à lire et à relire, à haute voix. (C.B et C.H)