Aux Cinq Rues, Lima

La vie n’est pas facile à Lima dans la décennie 1990. Que l’on soit Enrique, puissant entrepreneur, sa femme, la sensuelle et oisive Marisa, Rolando, patron d’un journal à scandales ou sa plume – l’implacable, intelligente, vaillante Julieta –, il faut respecter le couvre-feu. Les guérilleros du Sentier Lumineux et du MRTA sévissent, le gouvernement autoritaire et corrompu de Fujimori et du « docteur », son second, inspire la peur. Rolando fait chanter Enrique avec une photo compromettante. Cela risque de lui coûter cher… De son côté, Marisa file le parfait amour avec Chabela, femme de Luciano, avocat ami d’Enrique…    

Mario Vargas Llosa (Un héros discret, NB juin 2015), prix Nobel 2010, concurrent malheureux de Fujimori aux élections de 1990, déroule une comédie de mœurs facile, palpitante, érotique, dans un pays au bord de la révolution, soumis à un régime autocratique. Il rend de manière appuyée le contraste entre une bourgeoisie égoïste, cynique, hypocrite, matérialiste, hédoniste, et des pauvres gens acculés et hébétés. La rédemption d’une héroïne venue du peuple finira par renverser la vapeur. La description redondante des ébats libertins leste un peu l’intrigue, mais la politique de ce Pérou-là, la vie intime des personnages entre respectabilité et dévergondage sont épinglées fort efficacement. (V.A. et C.R.P.)