En 1945, Wilhem FurtwĂ€ngler, chef incontestĂ© de lâOrchestre philarmonique de Berlin, trĂ©sor national de lâAllemagne, et reconnu dans le monde entier, est jugĂ© Ă Vienne et Berlin pour ses sympathies hitlĂ©riennes. Il nâa jamais Ă©tĂ© nazi et a refusĂ© toute marque dâadhĂ©sion au rĂ©gime ou au personnage du FĂŒhrer. Alors pourquoi ne sâest-il pas exilĂ© ? DisculpĂ© mais fatiguĂ©, câest en Suisse quâil revisite une vie riche de rencontres fabuleuses dont celle de la cĂ©lĂšbre et fictive cantatrice wagnĂ©rienne Christa Meister, dĂ©portĂ©e Ă Birkenau. Le fils de celle-ci, Rodolphe, excellent pianiste et chef dâorchestre, rencontre le MaĂźtre avant sa mort en 1954. Il sera son successeur…
Le fil conducteur de cette biographie trĂšs largement romancĂ©e, vivante, documentĂ©e et bien Ă©crite, c’est lâingĂ©rence de lâArt en politique et inversement. LâArt peut-il se soustraire Ă lâĂ©thique ? Le cas FurtwĂ€ngler est sĂ©duisant : lâorgueil du maestro a-t-il dĂ©passĂ© sa responsabilitĂ© morale et son attitude passive a-t-elle cautionnĂ© la rĂ©alitĂ© tragique du nazisme ? Il a refusĂ© de choisir entre son Art et son pays. Lâhabile insertion des personnages fictionnels, auxquels lâauteur donne une vĂ©ritable épaisseur, ajoute du romanesque Ă lâhorrible rĂ©alitĂ© historique et au dĂ©bat philosophique. Menuhin a inspirĂ© le romancier, lâĂgypte lâa rappelĂ© (Nefertari dream, Les Notes avril 2020) et il revient Ă la musique avec ce rĂ©cit douloureux et vibrant. (A.C. et C.R.-G.)