Otto von Bismarck, fondateur de l’unité allemande, fut l’objet, de son vivant, d’un véritable culte dont il se fit l’architecte et qui perdure. Issu d’une famille de « junkers » prussiens, il apparaît comme le champion du conservatisme. En fait, personnage complexe et indépendant, il ne se lia à aucune tendance politique, sut épouser les thèses des libéraux, paraître révolutionnaire parfois et même « bonapartiste ». D’un loyalisme monarchique indéfectible, attaché au bien de l’État, partisan de l’autorité, il réussit, grâce à une souplesse diplomatique incomparable, à unir les États allemands sous l’égide de la Prusse, à faire de l’Allemagne la pièce maîtresse de l’échiquier européen et, prenant les socialistes à revers, à instaurer le premier système d’assurances sociales en Europe.
Jean-Paul Bled, professeur à la Sorbonne, spécialiste des pays germaniques (Frédéric le Grand, NB octobre 2005), parvient à rendre limpide une période où le jeu entre la France l’Autriche, la Russie et les États allemands et scandinaves fut particulièrement complexe. Il montre un Bismarck subtil, aux facettes multiples. Il justifie sa légende sans dissimuler les ombres du personnage. Cette biographie, vivante, minutieuse et d’un accès aisé, est assortie d’une bibliographie intéressante.