La bouquinerie de Paul, « Aux livres invendables », est Ă son image : mal entretenue. Spectateur inerte, il ignore les rares clients qui passent la porte. IndiffĂ©rent Ă son propre sort, il ne porte aucun intĂ©rĂȘt aux autres jusquâau jour oĂč il rencontre Borinka, enfant sautillant et capricieux dans le corps dâun vieillard. Ensemble ils vont pratiquer, avec virtuositĂ©, misanthropie, pessimisme et cynisme.
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Dans le mĂȘme esprit anticonformiste de Une si douce impatience (NB avril 2006), Pierre Drachline tisse, autour de la trame dâune amitiĂ© ou plutĂŽt de lâunion de deux ĂȘtres, un roman qui dĂ©nonce avec fĂ©rocitĂ© la mĂ©diocritĂ©, lâuniformisation et la sectorisation. Ă travers Paul lââaquoibonisteâ discrĂštement apprivoisĂ© par La SinguliĂšre, « son parallĂšle affectif », et Borinka le provocateur, prisonnier de ses souvenirs d’enfance, l’auteur aborde, avec grĂące, la vieillesse et la solitude. Il aime les aphorismes et en abuse, ce qui donne au rĂ©cit une rugositĂ© qui, loin de laisser indiffĂ©rent, donne Ă rĂ©flĂ©chir. On grimace parfois au contact de ces deux clowns tristes mais ils nous font, souvent, bien rire.