Ils se sont rencontrés par hasard, ils étaient jeunes, il a quitté femme et enfants pour vivre avec lui ; maintenant il est grabataire mais leur amour est sans faille. Il n’a que cinquante-cinq ans, mais sa femme, beaucoup plus jeune, le traite de vieux et l’humilie ; elle mourra avant lui. À quatre-vingt-dix-sept ans, il n’oublie pas qu’il a été violé, enfant, par son abominable tante. Le dimanche, un couple visite des hôpitaux psychiatriques pour se vacciner contre la démence sénile. Octogénaire odieuse et manipulatrice, elle couvre d’injures ses enfants… Régis Jauffret quitte les dramatiques faits divers (Claustria, NB février 2012) pour un sujet universel : la vieillesse. Le ton est donné avant d’aborder les seize histoires : « Bravo. C’est une performance d’avoir si longtemps vécu. Qu’il soit acclamé le convoi des vieillards ». À travers la dérision, l’humour grinçant, perce la tragédie. Goût du malheur, provocation – l’auteur ne la craint pas – ou simplement peinture effrayante de la réalité ? C’est ce que redoute le lecteur, face au délabrement de « détritus vivants », acariâtres, méchants ou, presque plus insupportable encore, pitoyables et attendrissants. Une écriture ciselée pour une impressionnante danse macabre avant l’heure. (V.M. et M.-C.A.)
Bravo
JAUFFRET Régis