Camarade Anna

BOGATYREVA Irina

Onze heures quarante-cinq, station « ProlĂ©taires ». Chaque soir, Anna sort du mĂ©tro : sa dĂ©marche est rapide, son visage fin, volontaire, sĂ©vĂšre. Valia, dĂ©barquĂ© Ă  Moscou pour Ă©tudier l’informatique, l’a remarquĂ©e et s’est dĂ©cidĂ© Ă  l’aborder. Membre du groupe des « jeunes patriotes », Anna l’entraĂźne dans leurs rĂ©unions secrĂštes oĂč – jeu ? nostalgie ? idĂ©ologie ? – ils ressuscitent le passĂ© rĂ©volutionnaire et le ton des soviets. MĂ©dusĂ©, peu client de leur critique du monde actuel, Valia s’amourache pourtant d’Anna, tente de se faire aimer. Difficile : pour elle l’amour est si « petit-bourgeois » !  Irina Bogatyreva naĂźt dans la mĂȘme ville que LĂ©nine, Ă©tudie la littĂ©rature Ă  Moscou, publie cinq romans et reçoit quelques prix. Ce livre ne raconte pas la pĂ©riode soviĂ©tique mais cible avec finesse quelques visages archĂ©typiques de la jeunesse russe actuelle. C’est aussi une histoire, celle d’une rencontre humaine, de deux visions du monde affrontĂ©es, d’une tentative de les concilier. La plume de l’auteur se plie, flexible, dans des slogans marxistes rabĂąchĂ©s, dans des formules contemporaines ironiques faussement dĂ©tachĂ©es ou dans des tournures narratives heureuses d’une bonne conteuse. Un regard subtilement acĂ©rĂ©, de l’humour, un joli roman. (C.R.P. et C.-M.T.)