Broadway, à l’origine vieux sentier indien traversant Manhattan, principale route de la Nouvelle-Amsterdam au XVIIe siècle, est associée dans la mémoire collective aux années 1920-1930, dites “folles”. Le destin de ses gangsters, bootleggers, “chorus girls” et/ou “chercheuses d’or” est révélateur : la culture volatile, la prééminence de l’alcool, du sexe et de la nuit, en font un quartier aussi hystérique qu’envoûtant. Les personnages archétypaux sont savoureusement portraiturés : Ziegfield girls, Fitzgerald, Arnold Rothstein, Al Capone, Louise Brooks, Fanny Brice ont en commun leur argot“vaudevillesque”, leur inépuisable faim… et leur solitude intérieure.
L’auteur de Bronx Boy (N.B. mars 2004) conserve son tendre regard sur les villes et leurs hurluberlus d’habitants, qu’ils soient malfrats, buveurs ou névrosés : à l’instar d’un Daniel Pennac à Belleville, il met en scène avec verve des personnages aussi attachants que truculents. Derrière la malédiction de Broadway, que Jerome Charyn qualifie de “longue nuit électrique”, se cache la détresse individuelle d’êtres théâtraux ayant besoin de briller pour vivre…