Quand elle dort, la tueuse à gages Anne (Feuille, NB novembre 2009) est environnée des images de ses victimes. Son conte pour enfant, Les trois menteurs, accepté par l’éditeur, la guérira-t-il de son lourd passé : un viol dont elle ne réchappa qu’à l’issue d’un mortel coup de ciseaux à son agresseur ? Las, la voilà chargée de tuer au fusil à lunettes, si nécessaire, son ami Pierre, mathématicien de génie, au cours du championnat de boxe des mi-lourds, lors d’un match que celui-ci doit livrer contre son partenaire de toujours aux échecs, Rachid. Et TJ (Thierry-Jean), l’ami d’Anne et Pierre, joueur invétéré, mise tout ce qui lui reste sur la victoire de Pierre…
Suite et fin d’un très original triptyque, titrant tour à tour sur un des menteurs du trio. Un enjeu intellectuel semble être proposé au lecteur : la reconstitution d’un récit pulvérisé. Exercice excitant et difficile, tant la narration mêle passé et présent, et itinéraires des trois héros. Le graphisme fait alterner des cases statiques aux personnages à visage de cire, d’un relief souvent saisissant, et en contraste des scènes de violence dynamiques et sanglantes. Esthétisme visuel et sophistication narrative sont à l‘unisson.