Comme une ombre

SCHNEIDER Michel

Une mère alcoolique, peut-être incestueuse. Une fratrie de six enfants nés de quatre hommes différents. Un père officiel homosexuel, également alcoolique. Une famille qui sombre dans la déchéance sociale et financière… Le septième enfant naît en 1944, point final d’une généalogie « tordue ». Il a aimé un de ses frères d’un amour désespéré et réciproque, ils n’ont jamais su le dire, l’accepter. Et cet aîné admiré, qui a initié son cadet fasciné à la musique et au sexe, se construit un personnage de voyou, d’une violence inquiétante. Il devient parachutiste pendant la guerre d’Algérie…

 

Le procédé narratif peut paraître sophistiqué : l’ombre du frère, mort depuis longtemps, resurgit avec la lettre d’une ancienne maîtresse. Et c’est tantôt le narrateur qui parle, traquant auprès de cette femme des souvenirs presque effacés, obscurcis par la guerre et le soupçon de torture ; tantôt, à la troisième personne, renaissent l’enfance partagée, la vie d’après le retour d’Algérie. Ce passé jamais liquidé semble celui de l’auteur, musicologue, psychanalyste, écrivain (Marilyn dernières séances, NB novembre 2006). Voyeur ou thérapeute contraint, le lecteur est cependant envahi par l’authenticité douloureuse de cette histoire de fusion et de déchirures, d’amour et de gémellité refusée, superbement écrite.