Sur le piano Ă queue, une partition de Bach. Sur la table, un carnet de notes. Une femme, crayon Ă la main, dĂ©cide de se replonger dans lâĂ©tude des Variations Goldberg. Dâabord lâaria, que son enfant aimait tant, puis les trente variations. Chaque mouvement fait surgir, en accord avec le tempo, des bribes du passĂ©, moments joyeux ou tristes, explosifs ou tendres, vĂ©cus en complicitĂ© avec sa fille avant que celle-ci ne soit fauchĂ©e, Ă vingt-sept ans.
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DĂ©chiffrage dâune partition, dĂ©cryptage dâune vie. Jean-SĂ©bastien Bach, lui aussi marquĂ© par le deuil, guide la mĂšre Ă travers le chaos de son existence, sa musique lâaidant Ă mettre en mots les souvenirs qui affleurent. Le procĂ©dĂ© peut paraĂźtre artificiel ; pourtant, quel rĂ©cit poignant, quelle retenue dans lâĂ©motion, quelle force dans lâĂ©criture, toujours sobre (cf. Le retour, NB mai 2007) ! Avec sa double formation de psychothĂ©rapeute et de pianiste, Anna Enquist superpose en contrepoint le visage lumineux de sa fille Ă l’analyse rigoureuse, presque austĂšre, de chaque variation.