Ève est morte. Jean l’a tuée deux fois. Il a d’abord pris son corps, puis il a pris sa vie. Ève avait vingt ans… Au rythme de l’aveu, de la procédure judiciaire et jusqu’au jugement, l’avocate des parents d’Ève retrace les parcours, donne la voix à chacun, semant ici et là des parcelles de sa propre vie.
Restituer la complexité d’un être humain, entendre derrière ce que chacun dit ce que chacun recherche, demande de l’expérience et une intelligence du cœur. Avocate pénaliste, Laure Heinich passe sans cesse de la mort à la vie dans ce premier roman respectueux et délicat qui s’impose à l’esprit. À chaque rouage de la mécanique judiciaire font écho les douleurs et les failles des acteurs de la tragédie. Malgré la rudesse du sujet et quelques aspects techniques, une profonde humanité inonde le récit, et si la plume est précise dans les faits, elle devient intimiste dans les consciences et dans les relations. L’avocate porte en elle la Shoah et les siens, le poids de l’héritage et de la transmission ; la victime porte en elle les désirs lesbiens et l’amour entre femmes, décrits tout en pudeur. Demeurent pour les parents la question du pourquoi et pour l’avocate cette interrogation : « La solitude des parents de meurtriers est-elle la même que celle des parents de victimes ? » (S.D. et Maje)